Le jour des barbares

Celivre d'Alessandro Barbero que j'ai lu il y a peu, est tout bonnement passionnant.
Court, limpide et efficace il a tout du livre interessant sur la période que personnellement je connais peu, la fin du IVème siècle et le début de la fin pour l'Empire.
Il place d'abord le contexte, car en effet rien ne sert de raconter une bataille décisive sans connaitre le pourquoi du comment. On y apprend ainsi que les peuples barbares n'ont plus grand chose de barbares et qu'ils se romanisent considérablement au contact de l'Empire. Il nous explique aussi très clairement la nouvelle organisation de l'armée romaine, largement composée de barbares romanisés. On apprend le personnage qu'était Valens et le degrés de corruption de l'empire d'Orient,....bref ce livre est une mine !

L'information qui m'a le plus interessé c'est comment Théodose va réussir à renverser la situation grâce à la véritable institution d'intégration qu'est l'armée romaine.
Le livre fourmille de détail en tous genre, mais des détails passionnant pour qui s'interesse à l'Empire

Un roman ou un livre documentaire ?

Le truc génial c'est que l'auteur a parfaitement réussis à combiner les deux. Cela donne un livre écrit comme un roman, mais avec des nombreuses infos annexes

Super ça. Un peu comme Manfredi, mais avec des annexes en somme ?

C'est un peu ça oui, j'ai beaucoup retrouvé le style Manfredi dans ce bouquin, ce qui, je pense, ne déplaira pas grand monde

En effet

c'est un livre trés bien documenté sur la bataille d'Andrinople et la défaite de l'armée d'orient en 378 contre les wisigoths.


Le Comitatus, l' armée d'accompagnement, est détruite.
Cette défaite de l'armée d'Orient aura d'ailleus plus de conséquences pour l'occident que pour l'orient.

Les Wisigoths deviennent une force de premier plan pour la région et finiront par migrer vers l'Italie puis le sud de la France et l'Espagne

L'auteur décrit trés bien le fait que les ''barbares'' ne désirent pas détruire l'empire mais veulent y vivre et s'y intégrer
C'est l'appat du gain (main d'oeuvre facile , corruption ..) qui engendra cette défaite cruciale

D'ailleurs les ''barbares'' se battent en ordre face aux légions du comitatus et reculent en ordre avant que la cavalerie Wisogoth (avec des Huns...) prennent de flancs l'armée Romaine engendrant sa panique et la perte de la bataille

Les ''barbares'' savent se battre en ordre (de nombreux ''brabres'' ont été des officiers Romains) et le font pour leur survie , ce qui explique cette victoire des Wisigoths

Tu dis que la cavalerie Wisigoth était accompagnée des Huns ... Peut tu m'en parler d'avantage même si l'on détroune le sujet brièvement ...
Car les huns n'ont-ils pas chassés justement les goths ?
Ces huns étaient-ils des "mercenaires"?

En fait, les Goths ne formaient qu'un peuple avant l'arrivée des Huns.
Avec les Huns, les Goths se sont divisés en deux : les Ostrogoths (Goths de l'ouest) qui sont passés dans l'Empire Romain comme fédérés, et les Wisigoths (Goths de l'est) qui sont devenus vassal des Huns.

Aaaaaaaaaah !!!
Je connaissait le scindement en deux branches, mais de savoir que les Ostrogoths étaient fédérés et que les Wisigoth étaient vassal des Huns, alors la j'en apprend une nouvelle ... une nouvelle de plus sur ce forum alors

Darayawuš a écrit:

Tu dis que la cavalerie Wisigoth était accompagnée des Huns ... Peut tu m'en parler d'avantage même si l'on détroune le sujet brièvement ...
Car les huns n'ont-ils pas chassés justement les goths ?
Ces huns étaient-ils des "mercenaires"?

A Andrinople en 378 l'armée Wisigothique est
- Wisigoth pour l'infanterie
-Ostrogoth , Alains et huns pour la cavalerie

les Goths sont repoussés avant 376 par les huns vers la frontiere Romaine puis passe le Danube avec l'accord de Valens , l'empire manquant de bras en cette époque
puis les choses tournent mal car les Romains ne tiennent pas leurs promesses (terre pour les goths...)

Ce n'est pas parceque les huns repoussent les Goths que les Goths n'ont pas de Huns dans leurs armées .
Les invasions sont plutôt des mouvements de population ou des raides pour piller
En l'occurence les Goths veulent devenir Romains , d'autres dans leur armée veulent piller (les huns?)

autre exemple historique avec d'étrange alliance
Bataille de Manzikert au 11 ième
l'armée Byzantine est composé de Byzantin et de mercenaires Turcs contre les Turcs
Ces mercenaires Turcs de l'armée Byzantine sont d'ailleurs les plus fidéles troupes pour cette bataille

l'histoire est étrange et n'est pas toujours aussi tranchée que cela

pour la vassalisation par les huns de certains peuples germaniques , il faut attendre plutot le 5 ième si mes souvenirs sont bons

Alexandre, tu as du inverser : ce sont les Ostrogoths qui sont soumis aux Huns à partir des années 370 et les Wisigoths qui passent au sein de l'Empire (menés par Athanaric et Fritigern, puis Alaric...). Il existait déjà des différenciations au sein des Goths, puisque l'on retrouve les mentions de Goths Tervinges et Greutinges.

La difficulté est que nos sources (romaines) méconnaissent tout ce qui se passe en dehors des frontières de l'empire. Selon les auteurs, on ne retrouve pas tout à fait les mêmes peuples. C'est bien souvent l'archéologique qui permet de trancher.
En l'occurence, les Huns bousculent les Goths dans les années 360-370 et obligent une part importante de ce peuple (je serai tenté de dire de cette confédération de peuples) à trouver refuge au sein de l'Empire.

En effet, les Goths (jusqu'à Alaric) n'étaient unis que lors des guerres. Mais il semble bien que sinon ils se divisaient autour de différents chefs (reichs).

Les Huns ont très tôt commencé leurs incursions (dès les années 390 ils passent en Orient, certains sont même présents en Asie Mineure). Un des premiers chefs que nous connaissions est Uldin (j'ai pas mal travaillé dessus cette année). Il a vendu ses services à Constantinople (en leur offrant notamment la tête de Gaïnas, un Goth révolté). On le retrouve ensuite en Occident où il participe à quelques batailles contre des Goths (ceux de Radagaise notamment). En 408-409, on le retrouve en Thrace en train de piller les provinces romaines. Il sera finalement obligé de faire demi-tour, son armée étant en proie à une épidémie.
Tout ça pour montrer que les temps sont durs pour l'Empire et la situation complexe. L'allié d'un jour est l'ennemi du lendemain, et vice-versa.

Reste que le livre dont nous parlons a déjà un grand mérite : faire connaître cette période méconnue et complètement occultée des manuels d'Histoire...

Stilicon a écrit:

Alexandre, tu as du inverser : ce sont les Ostrogoths qui sont soumis aux Huns à partir des années 370 et les Wisigoths qui passent au sein de l'Empire (menés par Athanaric et Fritigern, puis Alaric...). Il existait déjà des différenciations au sein des Goths, puisque l'on retrouve les mentions de Goths Tervinges et Greutinges.

Oups, mea culpa ^^. Pourtant c'est facile à retenir qui est à l'ouest et qui est à l'est ^^.

Le problème en histoire souvent, c'est qu'on a beaucoup de sources pour les vainqueurs et qu'on en oublie le point de vue des vaincus, je reprends la fameuse phrase de César, dans la guerre des Gaules Vae victis: malheur aux vaincus, il aurait fallu que Vercingétorix écrive lui aussi la guerre des Gaules pour entrer dans l'histoire, le point de vue aurait été très intéressant pour nous, enfin ça n'est qu'une plaisanterie, et un exemple, il y en a certainement de plus probants et en plus grand nombre, mais en France, nous sommes les héritiers culturels de Rome, d'Athènes et des hébreux, c'est les civilisés qui dominent toujours sur les autres population, c'est un principe, peut-être dérangeant mais toujours avéré que l'impérialisme et le colonialisme, après c'est vrai que la Gaule romanisée a gardé une part de son identité plus ou moins, mais notre langue n'a conservé, je crois qu'une centaine de mots celtes, et je ne m'en plains pas, c'est un petit constat! c'est toujours la question des traces écrites, on a des milliers de documents latins et grecs, les Celtes nous ont laissé des vestiges lithiques et archéologiques; ce sont les vainqueurs et ceux qui maîtrisent l'écriture qui font l'histoire.
Cependant, ce qui est remarquable depuis quelques décennies, c'est qu'on revisite l'histoire de façon beaucoup plus scientifique qu'avant et on voit naître des ouvrages du titre de ce post le jour des barbares que je ne connais pas, mais je prendrai le temps de le feuilleter!

Euh Vae Victis dans la guerre des Gaules ?? A ma connaissance ce sont les mots prêtés à Brennus par Tite Live dans son Histoire, lors de la prise de Rome en - 390.

Quand aux réflexions sur la méconnaissance des cultures "vaincues", c'est une évidence si ce n'est qu'ici en l'occurrence les Barbares sont vainqueurs. Et pourtant nous gardons le point de vue de leurs adversaires romains
Pour continuer dans cette idée, je dirai que la principal perdante de l'histoire est...la femme. Nous ne gardons que bien peu de traces du beau sexe comparé à la masse de sources générales sur l'univers masculin

Enfin, placer l'héritage hébraïque au même niveau que l'héritage greco-romain me semble bien présomptueux. Mais je ne veux pas faire du hors-sujet.

Je précise toutefois que, même si ce livre est très bon, il n'a pas été écrit par un spécialiste (l'auteur a écrit aussi un livre sur Waterloo si je ne m'abuse). Pour Andrinople et la percée des barbares rien ne vaut les sources (Ammien Marcellin) et quelques bons livres de synthèse sur l'antiquité tardive. Pour les passionnés de la question sur le plan militaire il y a la fin de l'armée romaine de P. Richardot (un chapitre entier est consacré à Andrinople, soit le sujet du jour des barbares) et le récent l'armée romaine au Bas-Empire de Y. Le Bohec...

Oh là là oui désolée, je me suis emballée sur ma citation et j'ai complètement oublié la réalité, pardon pardon!!

Merci Stilicon du recadrage, oui je ne voulais pas mettre les grecs et les hébreux au même niveau, simplement dire qu'ils sont aussi une part de notre héritage, je ne veux même pas les comparer, ça ne me paraît pas nécessaire, tant leur culture et leur religion diffèrent de nos antiques gréco-romains.
Merci pour les autres sources, tes propos me sont précieux;en parlant d'Ammien Marcellin, j'avais commencé la lecture sur Julien l'Apostat et sur Constance, l'ambiance (pourtant sanguinaire remplie d'intrigues et de meurtres) de cet ouvrage m'a envoûtée mais je n'ai pas tout lu, et n'étant pas historienne, en ce moment, j'ai du mal à organiser ce que je lis, je ne suis pas une pro, je suis en capes de lettres classiques et je me suis lamentablement ramassée en dissertation, pour l'armée romaine au bas empire, Y Le Bolec en parle sur canalacademie.com, c'est une radio que j'écoute quand je le peux, nos grands académiciens et normaliens y font des apparitions très riches!

L'ouvrage de Le Bohec quoique bien fait est tout de même à mon sens moins fondamenal que celui de Richardot. Mais un élément mis en avant par l'auteur est à mon sens très intéressant ; une relecture de la prétendue armée de manœuvre, le comitatus , opposé aux limitanei, ou armée des frontières. En effet il associe cette distinction à un ordre dans la dignité, le prestige, le comitatus étant l'armée dite d'élite (pour faire rapide). Cela en tout cas me semble plus pertinant que la traditionnelle partition rigoureuse qui n'apparait guère dans Ammien par exemple.

Pour ce qui est du récit d'Andrinople, je dois dire que je rejoins Stilicon ; le récit d'Ammien est suffisamment clair et détaillé et permet de saisir au delà de ce que tout livre d'histoire peut donner à savoir une atmosphère.